Trouble de Stress Post Traumatique

Le stress mal vécu serait à l’origine de 60 à 80% des consultations médicales. Souvent attribué à un mode de vie trop exigeant en terme de performances, il est enduré par de nombreuses personnes comme un attribut inévitable de la vie moderne. En réalité, le stress est souvent consécutif à un événement traumatique (agression, rupture relationnelle, deuil, accident, guerre, chirurgie, etc.).

Souvent, la charge traumatique n’est pas évacuée et la représentation interne du traumatisme persiste. Le stress devient alors chronique et autonome. Avec le temps, l’organisme devient saturé. Lorsqu’il atteint les limites de la résilience biologique, la somatisation commence : insomnie, anxiété, douleurs chroniques, troubles gastro-intestinaux, hypervigilance, culpabilité, émotions envahissantes, dépendances, dépression sont autant de manifestations d’anciens traumas encore actifs. Ceux qui souffrent de ces symptômes ignorent la plupart du temps quel événement traumatique est à l’origine de leurs maux.

Lors de violences extrêmes, incompréhensibles, confrontant à la mort imminente, avec une impuissance totale et faisant s’effondrer toute les certitudes acquises, le cerveau est dans l’incapacité de se représenter l’événement, de l’intégrer et de le relier à des repères acquis: la réponse émotionnelle reste maximale et les taux hormonaux deviennent toxiques pour l’organisme (risque d’infarctus du myocarde de stress et d’hypertension maligne, risque épileptique et de mort neuronale). Le risque de mort imminente du à la réaction physiologique du corps est réel. Pour survire l’organisme a recours à une voie de secours exceptionnelle qui va faire disjoncter le cerveau émotionnel en provoquant une dissociation corps-esprit. Malgré les violences qui se poursuivent il n’y a plus de risque vital ni de souffrance physique.

Toutefois, la mémoire émotionnelle ne pourra être traitée et intégrée, elle restera piégée : c’est la mémoire traumatique. Les stimuli traumatiques vont être traités sans connotation émotionnelle et sans souffrance physique ce qui va donner une impression d’étrangeté, d’irréalité, de dépersonnalisation.

La mémoire traumatique produit des réminiscences intrusives qui envahissent totalement la conscience (flash-back, illusions sensorielles, cauchemars) et qui font revivre à l’identique tout ou une partie du traumatisme, avec la même détresse, la même terreur et les mêmes réactions physiologiques, somatiques et psychologiques que celles vécues lors des violences.

Non-intégrée et hypersensible, elle est déclenchée par des sensations, des affects, des situations qui rappellent, consciemment ou non, les violences ou des éléments de leur contexte, et ce jusqu’à des dizaines d’années après le traumatisme.

Lorsque la mémoire traumatique n’est pas identifiée ou reliée au traumatisme, elle devient très difficile à calmer, déstabilisante et destructurante (impression de danger et de mort imminents, de devenir fou). Afin d’éviter de déclencher la mémoire traumatique, des conduites de contrôle et d’évitement vont être mises en place par la victime (évitements des situations, des sensations, des pensées, des émotions). Quand ces conduites ne suffisent plus, la mémoire traumatique “explose” entraînant détresse, terreur et angoisse insupportables. Ainsi, seule des conduites dissociantes, dont la victime a fait l’expérience de leur efficacité durant le trauma, vont pouvoir calmer l’état de détresse. Il s’agit alors de re-déclencher la disjonction du circuit émotionnel en augmentant le niveau de stress pour recréer un niveau de survoltage suffisant par des conduites agressives contre soi-même (tentatives de suicide, auto-mutilations, conduite à risque, drogues) ou contre autrui.

Ces comportements d’évitement entraînent une anesthésie affective et physique, des sentiments de culpabilité, de honte, de dépersonnalisation ainsi qu’une vulnérabilité accrue face au monde extérieur qui devient un terrain miné. La mémoire traumatique s’aggrave et s’inscrit durablement dans les schémas neuronaux. Ces troubles de la personnalité, souvent diagnostiqués à tort en troubles borderline, sont à la fois paradoxaux, douloureux et incompréhensibles pour les victimes et leur entourage.

La prise en charge va à la fois aider les victimes à sortir de leur isolement, à mieux se comprendre, à retrouver une dignité, déculpabiliser et reprendre espoir, permettant ainsi le soulagement. Cette amélioration se fait en permettant aux victimes de comprendre l’origine de leur souffrance, de faire des liens entre les violences et leurs symptômes. Il s’agit de réunir toutes les pièces isolées qui vont permettre de reconstruire l’événement traumatique avec cette fois-ci un accompagnement pour moduler les réponses émotionnelles sans nécessiter le recours à la dissociation. En faisant appel à des techniques thérapeutiques adaptées (hypnose, EMDR, méditation), la mémoire traumatique est désensibilisée sans que la personne ne revive le traumatisme dans son intensité émotionnelle. L’arrêt des conduites dissociantes va permettre une récupération neurologique pour la personne qui pourra se retrouver elle-même, qui elle est au delà du traumatisme.